Les normes Iso 56000 Series

Associer « normalisation » et « innovation » peut paraitre relativement contre-intuitif de prime abord et soulève parfois des réactions passionnées. Il faut dire également qu’il n’est pas simple pour les responsables innovation de trouver des informations claires et compréhensibles sur ce que sont et ce que ne sont pas ces normes. Engagés depuis le début des travaux internationaux et assurant aujourd’hui la présidence de l’ISO TC 279 qui les rédige, nous répondons ici aux questions les plus courantes.

Des normes en lien avec le management de l’innovation

Les normes de la série ISO 56000 concernent le domaine du Management de l’Innovation. Elles sont développées par le comité international de normalisation ISO TC 279 et sont applicables à toutes les organisations, dans le monde entier.

La normalisation est un domaine encore trop mal connu dans l’écosystème de l’innovation et considéré avec beaucoup de préjugés. Pourtant, penser que la normalisation revient à enfermer les organisations dans des cases est aussi faux que de considérer que l’innovation est le fruit du génie d’une personne.
La norme la plus connue à ce jour est l’ISO 9001 et décrit le « Système de Management de la Qualité » et cela amène à confondre « normalisation » et « qualité ». Il est vrai que des implémentations dogmatiques et peu habiles de cette norme ont pu conduire certaines entreprises à crouler sous la documentation et les procédures, rendant les responsables innovation peu enclins à accueillir le mot « normalisation » avec un a priori positif.
Mais en se concentrant sur ce côté émergé de l’iceberg, on oublie que la première publication de l’ISO 9001 date de 1987 et qu’elle a participé à transformer les entreprises avec une forte augmentation de la fiabilité des produits et des services et une importante amélioration de la satisfaction client dans tous les secteurs et dans le monde entier.
L’ISO 9001 a professionnalisé le domaine de la qualité comme les normes ISO 56000 Series professionnaliseront le domaine du management de l’innovation.

Vous vous demandez peut-être …

Johan Claire, Président d’Innovation Way a aussi l’honneur et la lourde tâche de présider le comité international de normalisation ISO TC 279 – Management de l’Innovation. Constatant chaque jour, sur le terrain, les doutes et incompréhensions liés à ces travaux, il partage ici son expérience et répond aux questions les plus courantes. Notons que ces contenus sont rédigés par Johan Claire en tant que dirigeant d’Innovation Way. Ils se veulent justes et objectifs, mais n’engagent nullement ni Afnor et la CN INNOV, ni l’ISO et le comité ISO TC 279.

Le site Afnor définit la norme comme suite : Lancée à l’initiative des acteurs du marché, une norme volontaire est un cadre de référence qui vise à fournir des lignes directrices, des prescriptions techniques ou qualitatives pour des produits, services ou pratiques au service de l’intérêt général. Elle est le fruit d’une co-production consensuelle entre les professionnels et les utilisateurs qui se sont engagés dans son élaboration. Toute organisation peut ou non s’y référer.

Reprenons ces éléments un à un.

  • Une norme est lancée à l’initiative du marché.

La rédaction et la publication d’une norme sont conditionnées à un vote du comité de normalisation concerné qui est lui-même composé de membres représentant le secteur d’activité. Ainsi, si un marché ne soutient pas un projet de norme, ce projet n’obtiendra pas les votes nécessaires et ne pourra donc pas voir le jour.

  • Une norme volontaire est un cadre de référence qui vise à fournir des lignes directrices, des prescriptions techniques ou qualitatives pour des produits, services ou pratiques au service de l’intérêt général.

On parle de norme volontaire, car sa mise en application n’est pas obligatoire. Les normes fournissent un cadre de référence, c’est-à-dire qu’elles posent un référentiel auquel tout le monde peut se référer ou se comparer. Elles peuvent concerner des produits, services, ou des pratiques au service de l’intérêt général. Cela signifie qu’elles n’ont pas pour objectif de servir une entreprise particulière, mais de viser à une amélioration de performance globale au service de tous.

  • Une norme est le fruit d’une co-production consensuelle entre les professionnels et les utilisateurs qui se sont engagés dans son élaboration.

Le terme essentiel ici est le mot « consensuelle ». La notion de consensus est au cœur du processus rédactionnel de toutes les normes. La rédaction d’une norme prend généralement 2 à 4 ans. Pendant cette période, un comité de normalisation se réunit régulièrement pour rédiger le contenu du document. Au cours de ce processus, le document est régulièrement soumis à commentaires de l’ensemble des membres. Chacun peut alors demander l’ajout, la suppression ou la modification d’un mot, d’une phrase, d’un paragraphe, etc., de façon à ce qu’au moment de la publication, l’ensemble des membres du comité puisse accepter le résultat. Cela ne signifie pas nécessairement que tout le monde est parfaitement satisfait, mais que le document ne souffre plus d’opposition, que son contenu fait consensus. Ce principe est fondamental dans les processus de normalisation et il peut expliquer pourquoi la formulation de certaines normes peut parfois vous paraitre alambiquée. Si vous pensez à une formulation plus simple, il y a fort à parier que quelqu’un l’ait proposé lors de la rédaction, mais qu’un autre participant s’y opposait pour une raison ou pour une autre et qu’il a fallu trouver une formule plus neutre.

  • Toute organisation peut ou non s’y référer.

Ceci renvoie une nouvelle fois au caractère volontaire de la mise en application.

Une norme n’est pas une règlementation ou une loi.

Il existe quelques normes dont l’application est rendue obligatoire par décret ministériel, mais elles sont très minoritaires. Il s’agit généralement de normes techniques dont l’application est rendue obligatoire, généralement pour des raisons de sécurité.  La liste complète de ces normes est disponible sur le site de Légifrance.

En dehors de ces exceptions, on parle de « normes volontaires », car elles sont toujours d’application volontaire. Cela signifie que les entreprises et autres organisations sont libres de choisir de les appliquer ou non.

Il peut néanmoins arriver que cette « liberté » soit toute relative lorsque le marché adopte largement un référentiel. Prenons le cas de l’ISO 9001 : aucune entreprise n’est légalement obligée de la mettre en œuvre. Néanmoins, lorsqu’à l’âge d’or de ce référentiel, les principaux donneurs d’ordre ont demandé à leurs sous-traitants de justifier d’une certification ISO 9001 pour être référencé fournisseurs, le choix était effectivement relatif. Les sous-traitants pouvaient parfaitement ne pas se faire certifier, mais prenaient le risque de perdre leurs clients.

Bien entendu, un référentiel ne s’imposera de cette façon sur un marché que s’il crée une valeur significative pour l’ensemble de la chaine de valeur.

En somme, une norme est quasiment toujours d’application volontaire, mais devient souvent incontournable lorsqu’elle permet des gains de performances significatifs.

L’ISO définit le système de management comme l’ensemble des processus par lesquels un organisme gère les éléments corrélés ou en interaction de ses activités afin d’atteindre ses objectifs.

Cette phrase est typiquement le résultat d’un processus de rédaction d’un nombre important d’experts travaillant dans le consensus. Elle est parfaitement juste, mais pas nécessairement simple à appréhender à la première lecture !

Ayant plus de liberté rédactionnelle ici, tentons d’être plus explicites. Les normes peuvent concerner des produits, des services ou des pratiques. Les normes dites de « système de management » se concentrent sur des pratiques organisationnelles.

Chaque norme de Système de Management propose un cadre d’organisation globale pour l’organisme qui la met en œuvre. Notons que dans la normalisation on parle « d’organisme » et non « d’entreprise », car ces référentiels sont applicables aux entreprises, mais aussi aux associations, collectivités, etc.

Il existe de nombreuses normes de systèmes de management qui ont des thématiques différentes. Les plus connues sont l’SO 9001 – Système de Management de la Qualité, et ISO 14001 – Système de Management Environnemental et ISO 45001 – Systèmes de management de la santé et de la sécurité au travail. L’ISO 56002 et l’ISO 56001 sont des normes liées au Système de Management de l’Innovation.

Les normes de Système de Management ont plusieurs particularités : 

  • Elles sont généralement rédigées de façon à être applicables à tous les organismes indépendamment de leur type, de leur taille ou de leur secteur d’activité.
  • Elles sont basées sur une structure commune historiquement appelée « HLS» (High Level Structure), renommée « HS » (Harmonized Structure) il y a quelques années.
  • Elles sont conçues de façon à pouvoir assurer une « intégration des systèmes de management ». C’est-à-dire qu’elles sont complémentaires et peuvent s’articuler les unes avec les autres. On trouve ainsi parfois dans les plus grandes entreprises des référents pour différents systèmes de management (responsable qualité, responsable sécurité, responsable environnement ou RSE, responsable Innovation, etc) et un « responsable du système de management intégré » qui veille à la cohérence de l’ensemble.

La structure HS (Harmonized Structure) précédemment connue sous le nom de HLS (High Level Structure) est une base commune à toutes les Normes de Système de Management. Elle offre une structure cadre et des termes de définitions communes permettant d’accroître la cohérence entre les normes de système de management et de simplifier leur utilisation. Partageant une base commune, il est plus facile pour l’utilisateur de comparer les documents et d’assurer l’implémentation de plusieurs normes de système de management en parallèle au sein d’un même organisme.

Le détail de cette structure commue est accessible librement dans un document dénommé « Annexe SL ».

Cette structure commune est importante pour la cohérence des différentes normes et peut faciliter le démarrage des travaux de rédaction d’une norme, car on ne part pas d’une page blanche. Néanmoins, dans le cadre de la rédaction des normes ISO 56002 & ISO 56001 dédiées au Système de Mangement de l’Innovation, l’utilisation de cette base a été perçue comme une contrainte forte par une partie de rédaction. Le domaine du management de l’innovation a ses spécificités et il n’a pas toujours été simple de composer avec une base imposée. Néanmoins, le groupe de travail a su aboutir à un consensus.

Le consensus est un principe fondateur de la normalisation. Écrire une norme c’est écrire un cadre de référence qui sera applicable à tous les organismes au service de l’intérêt général.

Les normes sont écrites par des comités de normalisation qui représentent le secteur ou le domaine faisant l’objet des travaux de normalisation. Un comité peut ainsi regrouper des organismes de toutes tailles qui peuvent avoir des liens (par exemple clients/fournisseurs ou concurrents) ou être totalement indépendants. Certains acteurs peuvent avoir des intérêts particuliers et chercher à influencer certains contenus du document, notamment pour obtenir un avantage compétitif. Cela fait partie du contexte et peut aussi apporter l’avantage d’assurer un fort niveau d’engagement des experts.

Néanmoins, lorsque l’on cherche à établir un référentiel applicable à tous, il est important de limiter les potentiels rapports de force qui peuvent résulter de ces relations et objectifs particuliers. Ainsi, au sein d’un comité de normalisation, tous les participants ont le même poids et la recherche de consensus est au cœur de toute action. Autrement dit, on cherche en permanence à aboutir à un résultat acceptable pour tous et non simplement validé par une majorité.

Les oppositions formelles sont donc toujours analysées, mais la recherche de consensus ne donne pas non plus le pouvoir de bloquer seul une proposition satisfaisant une large majorité.

La diplomatie est donc une qualité essentielle pour la rédaction d’une norme !

Les normes sont, sauf exception, d’application volontaire et parmi toutes les normes, les normes de Système de Management sont particulières.

Mais il faut encore catégoriser les normes en « normes d’exigences » et « normes de recommandations ».

Une norme de recommandations est à considérer comme une guide ou un recueil de bonnes pratiques. Elle donne des conseils et contient donc des formulations telles que « l’organisme pourrait ou devrait… ». Les normes de recommandation ont vocation à favoriser l’amélioration de performance des organismes qui les mettent en œuvre, mais ne prévoient pas de mécanisme de contrôle de la bonne mise en œuvre. Elles ne peuvent pas donner lieu à une certification par un organisme d’externe. L’ISO 56002  – Système de Mangement de l’Innovation – Recommandations est une norme de recommandation. Tout organisme proposant une éventuelle certification ISO 56002 ou se réclamant d’être certifié ISO 56002 commettrait donc un abus trompeur.

Les normes de recommandations sont généralement longues que les normes d’exigences. Elles comportent des descriptions plus détaillées.

À l’inverse, les normes d’exigences comportent généralement moins de texte que les normes de recommandations. Les formulations sont plus généralement courtes et n’entrent pas dans un niveau de détails trop avancé, car chaque élément indiqué représente une exigence pour laquelle l’organisme devra pouvoir prouver la bonne application dans le cadre d‘un audit.

Une norme d’exigences a en effet vocation à permettre la certification de ceux qui la mettent en place. Elles sont donc constituées d’une liste d’exigences avec des formulations du type « l’organisme doit… ». Il est alors possible de solliciter un audit du système de management par un auditeur externe pouvant permettre d’obtenir un certificat de conformité. La norme ISO 56001- Système de Management de l’Innovation – Certification, publiée en septembre 2024 est une norme d’exigence pouvant donner lieu à certification.

L’ISO (Organisation international de normalisation) est un réseau international regroupant les principaux organismes de normalisation du monde. L‘ISO élabore et publie des normes internationales en coordonnant les travaux menés par des experts.

L’ISO est organisée en Comités Technique (les « TC »). Chaque Comité Technique est identifié par un numéro et traite d’une thématique particulière.  

Un comité technique ISO regroupe des experts inscrits dans un comité miroir national et mandatés par leurs organismes nationaux de normalisation (NSBs) par exemple : Afnor en France, JISC au Japon, NACAL au Pérou, …

L’ISO TC 279 est le Comité Technique de normalisation international dédié au Management de l’Innovation. Ce comité est en charge de développer les normes de la Série 56000. Il regroupe plus de 300 experts issus de plus de 75 pays.

L’association AFNOR et ses filiales constituent un groupe international au service de l’intérêt général et du développement durable. Le groupe est organisé en 4 métiers :

  • Afnor Normalisation accompagne et guide les professionnels pour élaborer les normes volontaires nationales et internationales
  • Afnor Editions propose des solutions de veille et d’information professionnelle et technique
  • Afnor Compétences propose une gamme complète de solutions de formation, coaching et conseil
  • Afnor Certification réalise des prestations de services et d’ingénierie en certification et évaluation

Afnor Normalisation est donc l’organisme de normalisation français. C’est cette structure qui est inscrite à l’ISO. Comme l’ISO est organisé en Comités Techniques, Afnor est structuré en Commissions de Normalisation (CN). Lorsque la France participe à un comité international, AFNOR établit un comité français en charge de suivre et alimenter les travaux internationaux. On parle alors de Comité Miroir. La CN INNOV est donc le comité miroir français de l’ISO TC 279, travaillant sur la thématique du Management de l’Innovation.

La commission française est organisée en plusieurs groupes de travail. Elle a pour objet de définir et défendre les positions françaises dans les travaux internationaux et en particulier au sein de l’ISO TC 279 et de développer des guides et normes complémentaires prenant en compte les spécificités françaises. Elle mène également des actions de communications pour faire connaitre les normes liées au management de l’innovation.

La liste de ses membres est publique et accessible sur la page dédiée à la CN INNOV.

Les normes sont toutes numérotées. Le numéro d’une norme est lié à une classification spécifique. Par exemple, la série 9000 correspond au domaine de la qualité, la série 14000 à l’environnement et la série 56000 à l’Innovation.

Attention, il n’y a pas de lien entre le numéro du comité et le numéro de la ou des séries qu’il développe. Ainsi les normes de la série ISO 56000 sont développées par le comité ISO TC 279.

La série ISO 56000 comporte plusieurs documents :

  • L’ISO 56000 se concentre sur la terminologie associée au Management de l’Innovation et utilisée dans tous les autres documents de la famille.
  • L’ISO 56001 est dédiée au « Système de Management de l’Innovation » et est une norme d’exigences.
  • L’ISO 56002 est également dédiée au « Système de Management de l’Innovation », mais sous la forme d’une norme de recommandations
  • Les normes ISO 56003, 56004, 56005, 56006, 56007, 56008 et 56010 zooment sur des composantes spécifiques du système de management de l’innovation ou apportent des illustrations.

L’ISO 56001 et l’ISO 56002 sont toutes deux consacrées au « Système de Management de l’Innovation ». Elles sont toutes des normes de Système de Management et sont toutes deux applicable à tous les organismes (entreprise, collectivités, etc).

La nuance entre les deux réside dans le fait que l’ISO 56002 est une norme de recommandations alors que l’ISO 56001 est une norme d’exigence. Ainsi, l’ISO 56002 est plus descriptive, plus détaillée. Elle est donc particulièrement indiquée pour les organisations qui souhaitent appréhender le Système de Management de l’Innovation dans le but de progresser en interne et sans chercher à obtenir une certification.

L’ISO 56001 est une norme d’exigences pouvant servir de base à la réalisation d’un audit externe. Elle est moins descriptive, plus condensée et plus générique. Elle est donc plus particulièrement indiquée pour des organisations souhaitant obtenir une certification de conformité afin de faire reconnaitre la qualité de leur Système de Management de l’Innovation.

La publication d’une norme ISO est le fruit d’un travail de plusieurs années réalisé par un Comité Technique international en plaçant le consensus au centre de la démarche.

Imaginez devoir écrire une définition de l’innovation qui soit simple, adaptable à tous les types d’innovation, compréhensible et adaptée à tous les secteurs et dans toutes les régions du monde.

Imaginez devoir co-écrire cette définition avec 10 de vos collègues et/ou professeurs et ajoutez comme contrainte que tous doivent être en accord avec le résultat. Ceci devrait vous donner une petite idée de la difficulté de l’exercice de normalisation.

Car, au sein de l’ISO TC 279, les normes de la série ISO 56000 sont écrites sur ce principe, mais en regroupant plusieurs dizaines d’experts issus de plusieurs dizaines de pays. Trouver un consensus prend donc du temps et cette recherche de compromis aboutit le plus souvent à une phrase que personne n’aurait écrite de cette façon de prime abord.

Par ailleurs, la norme se veut être un cadre de référence donnant des lignes directrices. Elle n’aspire pas à imposer une manière unique de faire. Prenons l’exemple du management de projets innovants. Il existe différentes méthodes de gestion de projets pouvant être employée en innovation :  Design Thinking, méthodes Agiles, Stage Gate, Lean Startup etc. Chacune de ses approches a des intérêts et des limites, aucune n’est la solution dans tous les contextes et pour tous les projets. La norme ne peut donc pas recommander l’une d’elles plutôt qu’une autre. Par ailleurs, d’autres méthodes peuvent apparaitre demain ou n’être employées que dans certains pays. Le comité a donc abouti à proposer un processus plus générique en recommandant dans l’ISO 56002 de mettre en place une démarche permettant d’identifier des opportunités, de générer des concepts, de les valider, de les développer et de les déployer. On se place ainsi à un niveau plus générique en proposant une démarche compatible avec les différentes méthodes sans que le terme « design thinking » apparaisse dans la norme.

Certains termes sont aussi purement liés à la normalisation. Ainsi, les normes de Système de Management s’appuient sur la Structure HS (Harmonized Structure), et parlent « d’organisme » et non d’entreprises, car les normes sont applicables aux entreprises, mais aussi aux collectivités, associations, centres de recherche, fédérations, etc. Organisme est donc le terme consacré pour représenter tous les types de structures.

Pour finir, ce travail est réalisé en anglais. Ainsi, la traduction représente souvent un défi additionnel, car il est demandé de limiter les anglicismes alors même que nous en utilisons beaucoup en innovation. La traduction est réalisée par un professionnel et validée par des membres de la CN INNOV, mais il peut arriver qu’elle ne soit pas parfaite.

En somme, il faut reconnaitre qu’il faut un certain temps et un peu d’entrainement pour appréhender sereinement la lecture d’une norme … Une collègue de la CN INNOV a pour habitude de dire que rentrer dans la normalisation c’est développer un nouveau réseau de neurones … Elle a probablement raison !

Le titre exact de l’ISO 56002 en France (pour ne prendre qu’un exemple) est :

NF EN ISO 56002:2021 – Management de l’innovation – Système de Management de l’Innovation – Recommandation

Mais vous pouvez aussi la trouver sous la référence ISO 56002:2019 – Management de l’innovation – Système de Management de l’Innovation – Recommandation

Reconnaissons que ces titres sont un peu longs et qu’il est plus simple de se contente de « ISO 56002 » !

Voici ce que signifie chaque élément de ces titres :

  • Le sigle ISO signifie qu’il s’agit d’une norme internationale développée par un comité international coordonné par ISO.
  • Le sigle EN qui peut être ajouté devant signifie que la norme a été reprise par le CEN qui est l’équivalent de l’ISO, mais à l’échelle européenne. La norme est donc acceptée au niveau européen.
  • Le sigle FR qui peut également être ajouté signifie que le document a aussi été accepté à l’échelle française.
  • L’année précisée après les « : » correspond à l’année de publication. Les 2 années d’écart entre la référence « NF EN ISO » et la version « ISO » s’explique par le temps qu’il a fallu pour que les documents soient acceptés au niveau européen puis français. Les 2 documents ont donc exactement le même contenu malgré ces 2 années de décalage. (Rappelons que nous étions en plein COVID …).
  • La mention « Management de l’Innovation » correspond au domaine ainsi qu’au nom du comité technique qui a porté la rédaction.
  • La mention « Système de Management de l’Innovation » est le titre du document en lui-même.
  • La mention « recommandation » précise qu’il s’agit d’une norme de recommandations et non d’exigences.

Les premières publications de l’ISO TC 279 et en particulier l’ISO 56002 – Système de Management de l’innovation a été publiée en 2019 au niveau international.

Cela fait donc un certain temps, mais il n’est pas étonnant que vous n’en entendiez parler que maintenant pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, les communautés regroupant des acteurs de l’innovation sont nombreuses et d’une façon générale, n’ont pas attendu la normalisation pour travailler ensemble et échanger de bonnes pratiques. La normalisation a longtemps été peu considérée par une partie de ces communautés, souvent par méconnaissance de ce qu’est une norme. Il a donc fallu attendre que les premiers référentiels soient publiés et que leur contenu infuse dans un certain nombre d’entreprises, d’universités et de sociétés de conseil pour que le sujet commence à se diffuser.

De plus, les premières normes publiées étaient des normes de recommandations, ne pouvant pas donner lieu à une certification et ont donc été considérées comme un outil en plus parmi tant d’autres.

Il faut également noter que l’ISO 56002 a été publiée au démarrage de la crise COVID. Il ne s’agissait pas vraiment du moment le plus opportun pour parler de transformation profonde et structurée visant à améliorer le développement de capacité d’innovations pérenne. L’urgence était à la survie et encourageait bien plus la recherche d’innovation spontanée.

Le sujet du Système de Management de l’Innovation a commencé à réellement se diffuser à partir de 2022 (premières demandes d’entreprises, premières offres d’accompagnement, intégration dans des programmes de formation universitaires…).

On observe une nette accélération de la diffusion de ces concepts depuis le début 2024 avec la publication annoncée de l’ISO 56001 pour la fin 2024. Cette norme étant une norme d’exigence et permettant donc la certification a nettement attiré l’attention de l’ensemble de la communauté.

La terminologie « Système de Management de l’Innovation » et les concepts associés font ainsi leur chemin amenant progressivement une nouvelle manière de considérer l’innovation, non plus comme la résultante de projets, mais comme le résultat de la construction de capacités d’innovations permises par la mise en place de multiples activités et processus dans les entreprises et autres organismes.

Il existe 2 normes consacrées au « Système de Management de l’Innovation » : l’ISO 56002 (une norme de recommandation) et l’ISO 56001 (une norme d’exigence). La différence entre ces 2 référentiels est détaillée ici.

Les normes sont des outils qui peuvent vous aider à structurer la mise en place ou l’amélioration de votre système de management de l’innovation. Mais construire un système n’est pas une fin en soi. L’objectif de la construction de ce système et de développer la capacité à innover de votre organisme.

Développer la capacité à innover signifie être capable de porter et de mener à bien plus de projets, plus divers et de façon plus régulière. Diversifier ses projets peut signifier être capable d’innover dans des produits, service, business models, etc. mais aussi être capable de porter des projets d’innovation incrémentaux ou de rupture ou encore d’innover pour créer de la valeur pour ses clients, ses équipes ou pour la société en générale.

Mettre en place un système de management de l’innovation aspire à développer votre capacité à développer l’innovation de façon systématique, organisée et structurée.  

Mais là encore, innover n’est pas une fin en soi ! L’objectif de l’innovation telle qu’elle est considérée dans les normes de la série ISO 56000 est de créer de la valeur. Cette valeur peut prendre de multiple forme. Elle peut être financière, commerciale, environnementale, sociale, consister à renforcer votre adaptabilité ou encore prendre la forme de création de connaissance…

Tout organisme, qu’il s’agisse d’une entreprise, d’une collectivité, d’une université, d’une association, etc, a pour objet de créer de la valeur et tout organisme porte une responsabilité dans le développement et l’évolution de la société et du monde. Ainsi, tout organisme est concerné par l’innovation et doit aujourd’hui s’assurer de le faire plus et mieux. Tout organisme a donc besoin d’un système de management de l’innovation.

On peut tout de même apporter une nuance sur le cas particulier de la Startup. Toutes les startups n’ont pas nécessairement intérêt à bâtir un système de management de l’innovation tout simplement parce que toutes les startups n’aspirent pas à innover de façon régulière et diversifiée. Une startup fait avant tout face au défi de réussir un premier projet. Or, pour réussir un projet unique, un système complet n’est pas nécessaire. Ainsi, si l’objet premier de la startup est de réussir un projet et de se faire racheter alors elle n’a probablement pas intérêt à envisager la mise en place d’un système complet. En revanche, si elle aspire à se pérenniser, elle aura alors besoin de renouveler l’exploit de l’innovation et ne pourra probablement pas compter éternellement sur le génie et le dévouement total de son créateur. Dans ce cas, elle aura grand intérêt à se structurer et à formaliser un Système de Management de l’Innovation.

Il existe différents rôles dans un comité de normalisation dont nous faisons ici un résumé. Notons que, par convention, nous parlons au masculin, mais que tous les rôles sont évidemment accessibles indépendamment des genres et qu’il est fortement recommandé d’assurer un équilibre de représentation.

Le premier rôle est celui « d’expert ». Un expert participe aux travaux de rédactions des normes. Il peut choisir de participer à plusieurs groupes de travail et ainsi travailler sur différents projets de normes. Les experts peuvent intervenir au niveau des comités miroirs nationaux ou au niveau international.

Il existe aussi des rôles de Project leader et de Convener. Il y a des nuances importantes entre ces 2 rôles, mais pour rester concis, ces 2 rôles ont en charge l’animation des groupes de travail, doivent s’assurer de la bonne conduite des travaux et assurer l’atteinte du consensus.

Chaque comité a aussi Committee Manager. Travaillant généralement pour le compte de l’organisme national de normalisation, il assure la gestion quotidienne et les services administratifs pour les travaux d’un comité technique.

Enfin, chaque comité dispose d’un président qui est responsable de la gestion globale du comité (participation, organisation, stratégie …).

Les travaux de normalisation sont ouverts à tous les acteurs du domaine des travaux de normalisation concerné. Indépendamment de votre âge, de votre formation ou de votre expérience, un comité se nourrit de toutes les expertises et visions.

Bien entendu, certains rôles demandent plus d’expérience et d’expertise que d’autres.

Concernant la question de la rémunération, non … on ne peut pas dire que cela soit financièrement rémunérateur. La participation aux travaux n’est pas rémunérée et les frais afférents à la participation aux réunions de travail en France et à l’international sont à la charge des participants, quel que soit leur rôle dans le comité.

De plus, sauf subventionnement particulier (ce qui peut arriver dans certaines commissions), l’inscription à une commission de normalisation peut avoir un cout en fonction de la typologie et de la taille de votre organisme.

On ne participe donc pas à un comité de normalisation pour une trouver une rémunération financière, mais pour y apprendre, y partager ses connaissances et pour participer concrètement à changer le monde en écrivant des référentiels qui peuvent avoir un impact mondial !

Si vous souhaitez participer aux travaux de la CN INNOV et de l’ISO TC 279, vous pouvez contacter le Committee Manager dont les coordonnées sont accessibles sur la page web de l’ISO TC 279.

Voici sans doute une belle opportunité de nourrir cette page ! N’hésitez pas à utiliser le bouton « envoyer un message ci-dessous » et à nous la poser. Nous nous ferons un plaisir de vous répondre et de compléter cet article !

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